L’un des exemples est le suivant : Ursinus College, une petite université de Pennsylvanie, a augmenté en 2000 ses frais de scolarité de 17,6 %, et les candidatures ont immédiatement bondi, 200 de plus que l’année précédente, pour 330 admis. Dans le même temps, ils ont aussi augmenté l’aide financière de 20%, signifiant que la charge financière globale pour les étudiants n’avait pas augmentée. Un bon nombre d'autres universités sont citées, y compris la bien connue Notre-Dame.
Des sociologues et des psychologues pourraient se régaler avec cette histoire. Des économistes chevronnés diraient que l’éducation est, comme quelques produits comme les cosmétiques ou les médicaments, de ces choses pour lesquelles la qualité importe plus que le prix. Comme le prix n’est pas un moyen pire qu’un autre pour évaluer la qualité, cela explique que la demande s’accroisse avec le prix.
Mais ce qui me titille particulièrement, alors qu’on parle beaucoup de réformes de l’université, est qu’une telle répartition des coûts est beaucoup plus juste, car moins égalitaire. Je m’explique. En théorie, l’université française est gratuite pour tous, et les syndicats étudiants font beaucoup d’efforts pour combattre les écarts observés en pratique. En effet, si pour augmenter les moyens des universités, on demandait à tous les étudiants des frais élevés, disons 1000€, ceux issus de familles plus modestes seraient pénalisés. Ainsi, puisque l’égalité de frais est érigée en principe comme chez nous, il est juste que ces frais soient faibles. Cependant, il faut bien noter que dans un système où les frais sont faibles mais constants, ce sont les familles aisées qui paient le moins, relativement à leur revenu. L’objectif d’égalité n’est donc pas l’objectif de justice sociale – j’ai l’impression que les syndicats se trompent de grand principe sur lequel s’arc-bouter.
L’exemple américain, par ailleurs implanté récemment au Royaume-Uni, de bourses compensant des frais encore plus élevés, disons 2000€ avec des bourses équivalentes pour la moitié des étudiants, montre qu’il est possible de faire supporter la réforme par les familles les plus aisées, à gain total constant pour l’université. La petite histoire racontée par le New York Times montre même que cette façon de faire pourrait même augmenter l’attractivité de nos universités à l’étranger !
Il resterait, ensuite, à décider de l’attribution des bourses. Il y a en gros deux façons de faire, la « méritocratie » et l’ « impôt sur le revenu ». Dans la « méritocratie », les bourses sont données aux meilleurs élèves, c’est le système américain. Les élèves brillants ne paient pas la tuition, et reçoivent en plus une bourse conséquente. C’est un système qui attire d’autant plus les meilleurs élèves, et où les élèves riches et brillants sont les grands gagnants. Dans le système type « impôt sur le revenu », les bourses sont attribuées en fonction du revenu des parents. C’est un système moins attractif pour les meilleurs étudiants, mais peut-être plus juste d’un point de vue social. C’est, je crois, le système qui a été mis en place par Tony Blair. Le choix entre ces deux systèmes serait un vrai choix politique de type droite/gauche. En comparaison, le système français actuel fait supporter le coût d’un système pauvre aux familles les plus modestes !
2 commentaires:
Très intéressant, l'adaptation des universités aux critéres de choix des parents et des étudiants... ça me rappelle très fort des problématiques d'évolution, qui interviennent souvent en sélection... sexuelle (tiens, une autre idée de billet à venir).
oui, c'est ca le côté amusant. Tu as raison de souligner le parallele avec les attributs sexuels. On voit qu'une université est bonne à son prix, donc augmenter son prix attire plus de candidats. De meme, les oiseaux en mauvaise santé ont des couleurs ternes, donc un partenaire sexuel en bonne santé a de belles couleurs, donc la sélection naturelle favorise les couleurs chatoyantes chez les males.
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